Expression de L’École émancipée

Ce message rapide pour insister sur les enjeux de la période : tout d’abord, le dernier jour de vote pour les élections professionnelles… Il faut mobiliser toutes les énergies possibles pour faire voter autour de nous, ce scrutin est extrêmement important pour des raisons que vous connaissez toutes et tous. Votez et faites voter FSU !

Mais c’est surtout, au sujet de la séquence sociale et politique que nous traversons, que nous voudrions faire le point. En voici les éléments qui nous semblent importants :

  • les raisons de la colère populaire sont fondées et légitimes, et nous partageons nombre de revendications (autour de la justice sociale). Le mouvement des gilets jaunes est le réceptacle de toute la frustration sociale accumulée depuis des décennies, dont Macron et sa politique ont accentué les effets, avec un mépris pour les classes populaires que celles-ci lui rendent bien. Parti d’une défense du pouvoir d’achat marquée par le refus des nouvelles taxes sur les carburants, le mouvement embrase maintenant nombre de questions sociales qui frappent les plus défavorisés.
  • démarré sans support d’organisations (et méfiant vis à vis d’elles), le mouvement est ancré et déterminé. Il s’organise « en bas » (notamment grâce aux réseaux sociaux) et refuse toute récupération ou détournement de ses objectifs. Malgré les violences du dernier week-end instrumentalisées par le pouvoir, la mobilisation remporte encore trois quarts d’opinions favorables, signe d’une colère largement partagée dans la population et de jour en jour la mobilisation se poursuit, s’étale, s’ancre dans la durée. Si, dans un premier temps, des franges importantes de salarié-es se sont tenues à l’écart, doutant du contenu et de la méthode déployés par les gilets jaunes, ces préventions tombent et des convergences significatives se font jour. Il en est de même pour nombre de gens et d’associations qui ont vu un aspect « anti écolo » au démarrage du mouvement.
  • le mouvement des lycéens (et des étudiants par endroits) vient ajouter encore à la crise actuelle : il exprime les inquiétudes d’une partie de la jeunesse aujourd’hui, qui la conduisent à converger avec le mouvement des gilets jaunes. Il faut noter que les violences policières sont d’une rare brutalité mettant en danger les jeunes qui osent se mobiliser…
  • le gouvernement est affaibli et très fragilisé. Nous assistons à une crise politique majeure avec la délégitimation complète de Macron et un gouvernement qui ne sait pas comment sortir de la crise. Les annonces d’Édouard Philippe d’un moratoire de 6 mois sur les taxes ne sont pas à la hauteur de l’attente sociale et provoquent la fureur de la plupart des gens mobilisé-es. Il faut aider ce mouvement à gagner et, pour cela, renforcer le rapport de forces face au gouvernement.
  • l’extrême droite, comme la droite extrême, ont essayé au début d’instrumentaliser le mouvement pour leurs politiques réactionnaires. Cela n’a rencontré qu’un petit écho, balayé par la radicalité sociale qui s’est développée dans la mobilisation. ​

Dans cette situation, on peut dire que le mouvement syndical (dans son ensemble) a eu un gros retard à l’allumage dans sa compréhension du mouvement et dans sa capacité de réaction pratique…Peut être parce que les couches qui étaient au cœur de la mobilisation au début ne sont pas de celles qu’il organise véritablement, parce qu’aussi il lui paraissait incongru qu’un mouvement important puisse se développer sans lui… Le développement de la mobilisation, son ancrage social proche des revendications syndicales « habituelles » ont levé peu à peu les défiances. Depuis maintenant une dizaine de jours, de plus en plus de militant-es et responsables syndicaux se sont impliqué-es dans la mobilisation, avec ou sans leur structure syndicale. Des secteurs de salarié-es entrent dans la mobilisation, avec notamment la question du pouvoir d’achat qui est mise en avant. ​

Les directions confédérales se sentent obligées de réagir. À l’initiative commune de la CGT et de la CFDT, une rencontre interprofessionnelle nationale au sommet se réunit en urgence demain matin. Nous ne savons pas ce qu’il en ressortira (bien qu’il nous étonnerait que cela débouche sur une action unitaire sur le court terme…). ​

De son côté, et avant la convocation de cette réunion, la CGT a proposé la tenue « d’une grande journée d’action le 14 décembre sur tout le territoire », centrée pour elle sur salaires, pensions et protection sociale. Il semble qu’en région il y ait des initiatives unitaires en construction qui ne soient pas forcément le 14. L’École émancipée est intervenue à plusieurs reprises dans les instances de la fédération pour que le syndicalisme prenne sa place dans ce mouvement social (en solidarité et en portant aussi ses propres revendications) et que la FSU s’implique pour renforcer le rapport de forces contre ce gouvernement. C’est pourquoi, il nous apparaît légitime de participer aux initiatives hebdomadaires des GJ et d’être au plus près du terrain avec les lycéens et étudiants mobilisés. En absence d’initiative unitaire sortant de l’interpro nationale, L’École émancipée sera favorable à une participation la plus massive possible à la journée du 14 décembre. Par ailleurs, des initiatives ont déjà lieu en régions autour de la mi-décembre, certaines intersyndicales s’organisent en ce sens (à Marseille, Toulouse,…). Nous pensons qu’il faut multiplier ce type d’initiatives locales construisant pratiquement les convergences nécessaires. ​

Nous devons nous saisir de cette séquence sociale pour porter toutes nos revendications : pour les salaires, l’emploi, l’égalité des droits, la justice fiscale, l’éducation… Les fédérations de fonctionnaires avaient prévu une intersyndicale le 18 décembre, elle devrait être elle aussi avancée à la semaine prochaine : ce sera l’occasion de porter les questions de salaires dans la fonction publique, mais aussi de rejeter avec force le projet de loi fonction publique prévu pour 2019 (individualisation des carrières et rémunérations, attaques contre le statut, recours accru au contrat, mobilité et incitation au départ…), ainsi que le projet de retraites par points. ​

Dans l’immédiat, des syndicats nationaux ont déposé des préavis de grève pour couvrir la période (le Snes, le Snuter), notamment au vu des mobilisations dans les lycées. Les enseignant-es ont toute leur place auprès des jeunes mobilisé-es : d’une part, nous nous opposons comme eux aux réformes des lycées, du Bac et à Parcoursup, et par ailleurs, il est essentiel d’être auprès de la jeunesse pour lui apporter notre protection. Ce week-end, des mobilisations auront lieu samedi : les GJ appellent à une nouvelle journée de mobilisation, c’est aussi le jour des Marches pour le climat qui se déclineront en différentes manifestations sur le territoire. Ici ou là, quelques tentatives de jonction entre ces diverses forces de contestation ont déjà lieu. En fonction de la configuration locale, des organisations syndicales sont aussi partie prenante. Ces mobilisations participent de l’affirmation de l’opposition générale à ce gouvernement, il faut y contribuer de toutes nos forces disponibles dans ce moment historique. ​

Bon courage à toutes et tous ! ​